Nous pouvons vraiment vivre ensemble…

45809_pesee-or-argent-capitalisme-liberalisme-chartres_440x260Une fois de plus, il nous semble nécessaire de « remettre une couche » (voir ici : « la solidarité, une facette de la charité  et ici : à quoi sert le CCFD-terre solidaire) face à la campagne de dénigrement que subit une nouvelle fois l’équipe de bénévoles du CCFD-terre solidaire de Plouay suite à la soirée de sensibilisation sur le grand marché transatlantique le 16 mai dernier .
Voici la teneur du texte que nous écrivons dans le bulletin paroissial de Plouay de Juin, à la demande du Père curé :

 » C’est quoi le CCFD-terre solidaire exactement ?
A Plouay, le CCFD est repéré surtout comme organisant la collecte des vieux papiers et des soirées d’information, mais son action s’exerce aussi dans d’autres domaines.
Le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement a été créé pour répondre à l’appel de la FAO lors de la famine de 1960 en Afrique. Le pape Jean XXIII invite alors les catholiques à réagir. Son appel est relayé par la Conférence des évêques de France qui demande aux associations catholiques de se fédérer pour se mobiliser contre la faim dans le monde. Ainsi naît le CCFD : à ce jour, 29 mouvements et services d’Eglise le constituent en France et accompagnent annuellement 450 projets dans le monde.
Sa démarche reste particulière : il ne s’agit pas de venir ponctuellement en aide par un geste de générosité mais de s’inscrire dans la durée pour répondre au mieux aux besoins des populations des pays en voie de développement. Particulière aussi, car son action ne se focalise pas sur les conséquences d’une famine ou d’une catastrophe mais elle cherche à comprendre les causes qui ont conduit à cette situation afin d’y remédier. Nous partons de la situation des plus pauvres et des plus précaires, dans un esprit de partenariat et de dialogue. Nous ne faisons pas pour eux ou à leur place !
Nous vivons aujourd’hui dans un monde dans lequel nous devons plus que jamais tenir compte des interactions complexes et mondialisées qui provoquent ces situations de famine ou de détresse. Tout se tient : finance, économie, politique, environnement, social. Il y a une interdépendance entre toutes ces composantes et toucher à l’une provoque des répercussions sur tout le reste. C’est pourquoi aujourd’hui le CCFD-terre solidaire a ajouté un nouveau levier à ses deux traditionnels modes d’actions (partenariat financier « là-bas » et information/sensibilisation « ici »). Cette nouvelle manière de faire se nomme le plaidoyer : il s’agit de faire du lobbying auprès des décideurs politiques et économiques pour influencer d’une manière éthique les décisions qui auront des impacts sur le reste du monde. Le CCFD invite les décideurs à prendre des décisions dans le sens du « développement de tout homme et de tous les hommes ». (Encyclique Populorum Progressio) .
Voir ici un exemple de ce travail de plaidoyer fait avec notre député, Philippe Noguès, au sujet de la RSE

pape_francois_vaticanPourquoi le CCFD dérange-t-il ?
Cette manière de faire très concrète (comprendre les causes et intervenir auprès des décideurs), place le CCFD-terre solidaire dans une position qui ne plaît pas forcément à tout le monde. Des courants intégristes et traditionalistes affirment que cet organisme « fait de la politique » en oubliant bien vite que tout est politique, dans la plus belle définition du mot : gérer les affaires de la cité et du monde pour le plus grand bien commun (nous en faisons tous d’une manière ou d’une autre ne serait ce qu’en allant voter ou en nous abstenant). Le CCFD répond ainsi aux appels du pape qui exhortent les chrétiens à s’engager là aussi.
Une des campagnes de dénigrement du CCFD est née dans les années 70-80 à l’initiative du journal « le Figaro » qui affirmait que cet organisme était pour l’avortement et soutenait les guérillas latino-américaines. L’aide auprès des personnes dans leur effort de libération sociale et économique a fait traiter de « communistes » les bénévoles de l’époque… et d’aujourd’hui. Cette campagne de dénigrement mensongère, bien orchestrée et faussement argumentée , resurgit régulièrement depuis plus de 30 ans pour chercher à discréditer et combattre le mode d’action du CCFD. Ses démentis et ses ajustements réguliers ne peuvent rien face à la calomnie que véhiculent certaines personnes qui ne supportent pas la différence…

P1050507 - 2014-05-16 à 17-59-05Rejoindre les périphéries…
De par son mode d’action et de présence, le CCFD est un des organismes catholiques qui trouvent un écho favorable auprès de non-croyants qui se sentent ainsi rejoints et compris dans leur souci humaniste de solidarité et de justice. Son approche évangélique, imprégnée de la doctrine sociale de l’Église lui permet de rejoindre tout homme issu de ce que le pape François appelle  » les périphéries » de l’Église, sans distinction d’appartenance religieuse ou politique.
Il y a eu, il y a un peu plus d’un mois, une conférence débat sur le Grand Marché Transatlantique à Plouay à laquelle ont participé une centaine de personnes. le GMT : un enjeu crucial car il en va de notre démocratie et de nos libertés ! Nous avons pensé qu’un débat devait se faire autour de ces enjeux. Notre joie et notre satisfaction furent grande de voir que si 80 % des participants étaient loin d’être des « piliers d’église », le discours humaniste que portent l’Église et le CCFD leur parlait et rejoignait le cœur de leur préoccupation éthique. Ce fut une manière de répondre à l’appel du pape de « rejoindre des périphéries » et de « quitter nos sacristies ». C’est aussi, pour nous, notre manière d’évangéliser et de rejoindre ceux qui sont « loin », dans un esprit de dialogue.
C’est cela, pour nous, la force subversive de l’Évangile à laquelle nous appelle le Christ. Et, là, est notre moyen d’actualiser son message. N’est-ce pas une richesse de l’accueillir ?
Une des chances de notre Église c’est sa diversité quand elle est respectée. Il en va de sa crédibilité et de son unité que cette acceptation de la différence. Il en va aussi du bien vivre ensemble au cœur de la société quand nous refusons, au nom de notre foi, toute stigmatisation, toute peur, et portons un regard chaleureux, une écoute bienveillante, une parole de paix à ceux qui sont différents et qui ne pensent pas comme nous.

Prenons aussi connaissance de l’interview de Mgr Jacques Blaquart sur  RCF, Paroles aux églises, le 6 février 2014, à l’entrée du carême
Les chrétiens ne doivent-ils aider que ceux qui sont chrétiens ? Non !!

Voici également un article paru dans le journal « La Croix » le 15 mars 2014 

Chrétiens, et si on changeait le monde ?
PATRICE DE PLUNKETT, journaliste et blogueur
(le surlignage en gras est de nous)

patrice-de-plunkett-1« Un pape venu du bout du monde ouvre nos portes et nos fenêtres. François nous appelle à « sortir » des routines. Son appel est entendu! Les catholiques français mettent en commun des thèmes autrefois séparés entre les diverses « sensibilités »… On peut en citer de nombreux exemples. En voici un, dont je dois m’excuser parce qu’il me concerne: le 18 mars à Paris, il y aura une conférence-débat sur l’appel du pape à élargir nos solidarités et transformer nos modes de vie (2). J’y serai l’intervenant, à l’invitation du CCFD-Terre solidaire. Cette invitation-là est significative, quand on se souvient des années 1980 et de la campagne politique qui avait été montée (à l’époque) contre le CCFD par un magazine dont je faisais partie… Trente ans plus tard, les choses ont changé en profondeur: je me retrouve aux côtés du CCFD, dans le combat contre la pauvreté et les structures d’injustice. Ce n’est qu’un petit exemple parmi beaucoup d’autres. Les lignes bougent chez les catholiques français.

Ce qu’il faut aussi remarquer, c’est que l’appel à l’élargissement international de nos solidarités et à la transformation de nos modes de vie – qui sont la vocation du CCFD – est entendu également par d’autres mouvements catholiques. Par exemple: à Clermont-Ferrand, en novembre 2013, les AFC et les frères capucins ont organisé une rencontre diocésaine sur le thème: « Chrétiens, et si on changeait le monde ? »; cette soirée a fait naître un réseau de jeunes foyers en quête de nouveaux modes de vie, qui s’appelle « Chrétiens changeons » et qui essaime déjà dans d’autres départements. À Chalon-sur-Saône, en février 2014, une rencontre semblable s’est tenue, sur le même thème, également organisée par les AFC. D’autres vont suivre… Pour ces jeunes parents catholiques, penser l’avenir de la famille et penser l’avenir de la société sont une même démarche, et elle exige des remises en question: en nous d’abord, et autour de nous. Jusque sur le terrain économique et social ou celui de l’environnement…

Sur le terrain social, tout le monde remarque la pugnacité du pape François qui dénonçait dès le mois de mai 2013, devant les ambassadeurs, « l’idole Argent s’emparant de tout ». Il soulignait que Dieu se situe « en dehors des catégories du marché ». Dans l’exhortation apostolique La joie de l’Évangile, François prend la défense de « tout ce qui est fragile » face aux « intérêts du marché divinisé »: c’est un appel à changer le modèle économique! La vigueur et la verdeur du pape n’ont pas seulement ravi, à « gauche », les mainteneurs du catholicisme social: elles ont frappé, à « droite », les plus dynamiques parmi les manifestants de l’an dernier contre la réforme du code civil. Dès le mois d’août 2013, certains d’entre eux se sont risqués dans une « marche des Veilleurs » à travers la France: c’était une tentative, authentiquement bergoglienne, pour rencontrer d’autres luttes que la leur (des luttes économiques et sociales), et pour se chercher des points communs avec elles. Quitte à subir des invectives et à devoir débrouiller des malentendus… Naissait ainsi, chez ces jeunes croyants, le goût d’élargir leur horizon, d’échapper au « mondain » (comme dit le pape), et de fuir l’autocélébration d’une « France bien élevée » qui ne partagerait pas les soucis du reste de la population.

Sur le terrain de la responsabilité envers l’environnement, l’élan donné par Jean-Paul II et Benoît XVI avait inspiré les premières Assises chrétiennes de l’écologie, à Saint-Étienne en novembre 2011. Il s’amplifie depuis l’arrivée de François, premier pape à préparer une encyclique sur la question – et à se faire photographier avec le tee-shirt international des opposants au gaz de schiste… Défendre la Création et défendre l’humain sont deux causes inséparables, soulignait François dès son élection. Défendre l’humain, dit-il, c’est lutter non seulement pour le droit bioéthique à la vie, mais contre « une économie de l’exclusion et de la disparité sociale »: car « une telle économie tue ». Nous comprenons ce message et nous le faisons nôtre. Il s’agit réellement de changer le monde. »

Voici également un article paru dans le périodique « Le Pèlerin » du 3 avril 2014

 

A quoi sert le CCFD-terre solidaire ?
Romain Mazenod dans « Questions de foi »

la_faim_dans_le_mondeTrop à gauche ? Pas assez catholique ? L’ONG, née en France en 1961, a traversé les vents mauvais qui ont soufflé, notamment dans les années 1980, et a tiré des enseignements des critiques, prove­nant, pour l’essentiel, de l’Église elle-même. Afin de bien comprendre, il faut remonter à sa fondation. En 1960, l’agence des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) lance un appel à la mobilisation mondiale contre la faim dans le monde. Le pape Jean XXIII invite les catholiques à réagir. L’année d’après, les évêques de France décident de créer le Comité catholique contre la faim*, avec comme objec­tifs la participation à la collecte nationale du Carême et la sensibilisation des catholiques à ces questions.
Le CCFD-Terre solidaire n’agit pas directement sur le terrain mais par l’intermédiaire de partenaires locaux, dûment sélectionnés mais pas nécessairement catholiques.
450 projets sont en cours dans 68 pays, pour l’essentiel en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Le deuxième pilier de l’ONG réside dans l’éducation au développement à travers la formation permanente ou la sensibilisation dans les écoles ou les paroisses. Enfin, un troisième pilier, le plaidoyer, vient d’être officiellement adopté dans le dernier rapport d’orientation pour la période 2014-2020. « Nous voulons influencer les décideurs politiques et économiques pour qu’ils prennent des décisions dans le sens du « développement intégral de tout l’homme et de tous les hommes » selon l’expression de l’encyclique Populorum progressio de 1967 », explique son président Guy Aurenche.
AidonslArgentL’une des dernières campagnes, lancée en 2009, avait pour slogan: «Aidons l’argent à sortir des paradis fiscaux». Guy Aurenche rejette en bloc les critiques sur un supposé soutien à des guérillas latino-américaines dans les années 1970 et 1980. « Comme nous aidions les peuples dans leurs efforts de libération économique et culturelle, on nous a traités de communistes. C’est un mensonge pur et simple. De même, nous n’avons jamais noué de partenariats qui aient pour objectif direct ou indirect de soutenir la contraception ou l’avortement ». Le président de l’ONG reconnaît simplement des « erreurs de communication » sur les choix de tel ou tel engagement. Il insiste surtout sur la solidité des liens entre le CCFD-Terre solidaire et l’Église. « Nous sommes un service d’Église; le Conseil permanent de la Conférence des évêques de France peut s’opposer à tel ou tel candidat à la présidence. Nous avons un aumônier national nommé directement par cette instance. Nous sommes pleinement catholiques et fiers de l’être, au sens de l universalité et du souci des plus pauvres.»

*Devenu Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD) en 1966, puis CCFD-Terre solidaire en 2008.

Voir aussi la conférence de Guy Aurenche  « Foi et éthique »

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